Mieux comprendre la hausse du prix de l'énergie

Pour mieux comprendre les raisons liées à la hausse du prix de l’énergie, nous vous proposons cette interview de Thomas BASSET, Directeur général adjoint concession électricité et Grégoire FOURCADE, Directeur général adjoint Développement et prospective.

Comment expliquer la crise actuelle liée au prix de l’énergie ? 
La crise est largement multi factorielle, ce qui explique sa durée. Chronologiquement, c’est d’abord une crise du gaz survenue à la suite de la crise du Covid. Le redémarrage soudain de l’économie, en Asie du Sud-Est par exemple, où d’importantes commandes de gaz ont eu lieu, a généré une augmentation relative du prix de l’énergie. 
Cette crise s’est propagée au secteur de l’électricité. Sur le marché, le tarif de l’électricité est fixé par le coût de revient de la centrale de production la plus chère, qui est aussi la dernière appelée à produire. Généralement, ce sont les centrales à gaz. La très forte hausse du gaz s’est donc répercutée sur l’électricité par ce mécanisme.
Mais le secteur de l’électricité traverse aussi des difficultés propres. Le parc de centrales nucléaires d’EDF produit très peu. Cela est dû, d’une part, au fait que les confinements ont bouleversé les plannings d’entretien des centrales. D’autre part, des inquiétudes sérieuses de corrosion sur certaines centrales ont conduit à en mettre à l’arrêt une partie. Le parc nucléaire est donc très peu disponible : il devrait produire 300 TWh cette année, alors qu’il produisait plus de 400 TWh chaque année dans les années 2000-2010. Cette faible disponibilité du parc nucléaire conduit à renforcer l’appel aux centrales à gaz, dont on a vu que le prix avait considérablement augmenté.
Enfin, la régulation du système électrique atteint désormais ses limites. Le Gouvernement avait instauré en 2010 l’ARENH (Accès Régulé à l’Electricité Nucléaire Historique) afin que les concurrents d’EDF puissent bénéficier des coûts du nucléaire. Or l’accès à cet ARENH est limité à 100 TWh et ne correspond plus aux parts de marché gagnées par les fournisseurs dits alternatifs. Cette limitation conduit à augmenter de manière artificielle les prix de l’électricité pour tous.  

Dans ce contexte, que fait le SIPPEREC ? 
Le SIPPEREC a interpellé depuis plusieurs années le Gouvernement sur la régulation du nucléaire en appelant à relever le plafond de l’ARENH à 150 TWh afin que l’investissement de la Nation dans le nucléaire puisse profiter à tous, particuliers comme collectivités. Le Gouvernement a mis partiellement en place ces mesures en réponse à la crise.
Par ailleurs, le SIPPEREC étant un des principaux acheteurs d’électricité en France (490 adhérents au groupement de commande d’électricité), il constitue un solide allié des collectivités. Dans ce contexte compliqué, il leur assure que ce sont des professionnels du domaine qui passent des marchés complexes... auxquels des candidats répondent, ce qui n’a pas été le cas pour toutes les collectivités dans la crise, certaines s’étant retrouvées sans fournisseur d’électricité. Les volumes achetés et l’expérience acquise permettent d’obtenir les meilleurs prix tout en restant malheureusement dépendants des prix de gros du marché de l’électricité en très forte hausse.

Est-ce que l’augmentation du prix de l’énergie va durer ? Qu’est-ce que l’on peut faire ?
Il est difficile de savoir si cela va durer. Mais la conjonction de facteurs économiques et géopolitiques pose la question de la relocalisation sur le territoire national de la production d’énergies et de la place des collectivités dans la ressource énergétique. 
Le SIPPEREC s’y est déjà largement engagé en développant massivement les réseaux de chaleur à base de géothermie : plusieurs centaines de millions d’euros ont été investis dans la dernière décennie pour développer cette énergie renouvelable qui réduit considérablement la dépendance au gaz et donc à la fois les émissions de CO2 et la volatilité de la facture. Par ailleurs, le SIPPEREC a négocié en 2016 un avenant au contrat historique d’électricité avec Enedis – le plus important de France – qui permet de financer à hauteur de 5 à 10 M€ chaque année les travaux de modernisation du patrimoine communal (bâtiments, éclairage public), et donc de baisser les consommations d’électricité. Enfin, un fort développement est engagé sur la production électrique à base d’énergies renouvelables locales comme le photovoltaïque et l’éolien, à la fois par les équipes propres du SIPPEREC qui développent des centrales photovoltaïques sur les bâtiments publics, et par les équipes de la SEM SIPEnR dédiée au développement des énergies renouvelables. Toutes ces actions ont pour objectif de réduire la consommation d’énergie et la dépendance aux énergies fossiles.
 

Thomas BASSET, Directeur Général adjoint Concession électricité
Grégoire FOURCADE, Directeur Général adjoint Développement et prospective